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Non, chers amis de Venise, ce n'est pas une boutade.
Nous ne rêvons pas : le projet de métro souterrain entre Mestre et Venise existe bel et bien. Les études sont très avancées et les décisions quasiment irrévocables. Le futur chantier a reçu le soutien de la région et de l'Etat... La polémique fait rage mais, forts de leur expérience concernant le pharaonique Mo.S.E., ce nouveau monstre marin qui n'en finit pas d'émerger dans les eaux de la lagune, les décideurs, politiques et industriels, avancent dans le secret et le silence, rendant toute action difficile. Tout et n'importe quoi se disent au sujet de ce que tout le monde appelle la Sublagunare. Tramezzinimag fait le point sur ce dossier.
S'il ne s'agissait que d'une simple polémique entre les anciens et les modernes, un léger différent entre les partisans du passé et les amateurs de nouveautés, nous pourrions sourire. Mais l'affaire est sérieuse, les responsables du projet, ses instigateurs comme ses détracteurs, portent une lourde responsabilité, peut-être la plus grande depuis la chute de la République : le chantier du métro aura des conséquences dont personne ne sait mesurer l'impact : comment réagira le très fragile écosystème lagunaire et le sous-sol du centro storico ? Quelles seront les conséquences d'un moyen de transport qui sera capable de transporter cent fois plus de monde à des fréquences bien plus nombreuses que les transports actuels, vers la cité des doges ? D'un autre côté, faut-il maintenir Venise figée dans son passé ou doit-on lui donner les moyens d'entrer dans les siècles futurs, comme une métropole moderne ?
Quelles conséquences en réalité ?
Le quotidien La Nuova Venezia, dans son numéro du 3 mars dernier, n'en soulignait que des négatives : augmenter encore davantage la masse de touristes qui envahissent la fragile Venise historique, mettre en danger les bases géologiques de la cité et ruiner définitivement l'écosystème lagunaire déjà bien mal en point. plusieurs millions d'euros d'études préliminaires avant même que soit envisagée la moindre consultation populaire ! A la seule initiative des entreprises qui ont lancé l'idée d'une liaison souterraine entre Tessera (l'aéroport) et l'Arsenal, qui permettrait il est vrai de rejoindre la cité des doges en 10 minutes !
Une somme est aujourd'hui réclamée par le président de la Chambre de Commerce, Massimo Albonetti, à la Municipalité qui traîne les pieds ! : "Si la sublagunare ne se fait pas", a-t-il dit lors d'un colloque, "la Ca’ Farsetti doit rembourser les frais d'études de faisabilité". "Bêtises" réplique le maire Massimo Cacciari, "la ville a rempli son rôle en faisant voter la reconnaissance d'utilité publique du projet mais la convention précise que le projet ne devra pas présenter une quelconque charge pour les finances municipales. Si on trouve les fonds et s'il s'avère qu'il n'y a aucun obstacle d'un point de vue écologique, nous soutiendrons le projet jusqu'à sa réalisation, mais nous ne sommes en rien maîtres d'ouvrage."
Nous ne rêvons pas : le projet de métro souterrain entre Mestre et Venise existe bel et bien. Les études sont très avancées et les décisions quasiment irrévocables. Le futur chantier a reçu le soutien de la région et de l'Etat... La polémique fait rage mais, forts de leur expérience concernant le pharaonique Mo.S.E., ce nouveau monstre marin qui n'en finit pas d'émerger dans les eaux de la lagune, les décideurs, politiques et industriels, avancent dans le secret et le silence, rendant toute action difficile. Tout et n'importe quoi se disent au sujet de ce que tout le monde appelle la Sublagunare. Tramezzinimag fait le point sur ce dossier.
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Quelles conséquences en réalité ?
Le quotidien La Nuova Venezia, dans son numéro du 3 mars dernier, n'en soulignait que des négatives : augmenter encore davantage la masse de touristes qui envahissent la fragile Venise historique, mettre en danger les bases géologiques de la cité et ruiner définitivement l'écosystème lagunaire déjà bien mal en point. plusieurs millions d'euros d'études préliminaires avant même que soit envisagée la moindre consultation populaire ! A la seule initiative des entreprises qui ont lancé l'idée d'une liaison souterraine entre Tessera (l'aéroport) et l'Arsenal, qui permettrait il est vrai de rejoindre la cité des doges en 10 minutes !
Une somme est aujourd'hui réclamée par le président de la Chambre de Commerce, Massimo Albonetti, à la Municipalité qui traîne les pieds ! : "Si la sublagunare ne se fait pas", a-t-il dit lors d'un colloque, "la Ca’ Farsetti doit rembourser les frais d'études de faisabilité". "Bêtises" réplique le maire Massimo Cacciari, "la ville a rempli son rôle en faisant voter la reconnaissance d'utilité publique du projet mais la convention précise que le projet ne devra pas présenter une quelconque charge pour les finances municipales. Si on trouve les fonds et s'il s'avère qu'il n'y a aucun obstacle d'un point de vue écologique, nous soutiendrons le projet jusqu'à sa réalisation, mais nous ne sommes en rien maîtres d'ouvrage."
Une manière politique de se dédouaner.
Car les vénitiens ne comprennent pas la position de la municipalité.
"Le maire suit le
mouvement comme s'il n'y avait aucun moyen de faire autrement..." est d'ailleurs le reproche entendu le plus souvent. "A aucun moment il n'a pris une position claire pour ou contre le projet. La municipalité s'est contentée de tout mettre en oeuvre pour réduire les dommages." m'explique un vénitien pourtant pro-Cacciari. Les lobbies et les politiques favorables au métro poussent le maire à se positionner. Les opposants au projet, (délibérément peu développé devant le grand public qui commence seulement à découvrir l'ampleur du danger), s'organisent. A ce jour, plus de 12.000 signatures d'habitants de Venise contre la Sublagunare ont été adressées à la Ca'Farsetti (la mairie). Ce n'est qu'un début....
C'est le groupe Italia Nostra qui a tiré la sonnette d'alarme, devant cette nouvelle atteinte à l'intégrité de la Sérénissime. Le chef de groupe des Verts au Conseil Municipal, Beppe Caccia, a écrit au maire pour demander la suspension définitive du projet en même temps qu'une réunion d'urgence de la majorité municipale. A ce jour, le dossier est toujours entre les mains de l'adjoint aux transports, Enrico Mingardi. Il devrait ensuite être envoyé à Rome. Le projet revu ("amélioré" disent ses partisans) par le groupe d'entreprises qui se sont proposées pour porter le project financing, suite aux nombreux doutes manifestés par les élus tant municipaux que provinciaux, doit suivre la voie normale. "La procédure doit suivre son chemin" nous explique l'adjoint, "puisque la municipalité de 2002 avait déclaré le dossier d'utilité publique, annuler tout cela aujourd'hui coûterait à la ville près de 8 millions d'euros"...Un projet vieux de 20 ans.
En 1990, un premier tracé prévoyait une ligne Tessera-San Marco-Lido, aussitôt bloqué par les nombreuses protestations internationales. Étouffé, il renaît en catimini en 2002, avec la municipalité dirigée alors par Paolo Costa, qui le déclara d'utilité publique, sans que l'opposition puisse l'empêcher. C'est l’adjoint aux Travaux Publics de l'époque, le Procureur Marco Corsini qui en avait pris alors l'initiative. Une simple ligne ajoutée au plan triennal des travaux approuvés par la municipalité, et le tour fut joué.
Les premières offres de service suivirent et c'est ainsi que tout a commencé. Le groupement d'entreprises qui s'était aussitôt mis en lice était formé entre autres de l'Actv (la société des transports urbains de Venise qui s'est retirée avec le retour de Massimo Cacciari à la mairie), et de Mantovani (la même entreprise qui réalise entre autres le Mose et le futur hôpital de Mestre), mais aussi Metropolitane Milanesi, et la Sacaim, tous plus ou moins proches de la Fininvest, la compagnie tentaculaire du Président du conseil Berlusconi. Mais, comme le disait en plaisantant un ami vénitien, "la collusion est un mot qui n'existe plus dans notre vocabulaire en Italie !".
Aucun débat démocratique.
Sans aucun débat en conseil municipal, ni dans les conseils de quartier, ni campagne d'information auprès de la population, le projet a pourtant continué son chemin. Seules la Région et la Chambre de Commerce apparaissent désormais dans les documents officiels comme initiateurs et maîtres d'oeuvre. La polémique ne fait que commencer....
Le gouvernement italien l'a inscrit dans son schéma global d'aménagement du territoire (la Legge Obiettivo) et l'équipe Cacciari n'a pas pu le bloquer au nom de la "continuité administrative". Pourtant les doutes sur la faisabilité et les risques pour la Sérénissime n'ont jamais été levés. Les géologues ont confirmé pourtant récemment que le sous-sol de la lagune est bien plus fragile qu'on ne le pensait. Des couches de sable existent au milieu des strates argileuses qui rendent hasardeuses la construction de galeries et d'excavations profondes. "Ce qui risque de se passer" me disait un ami ingénieur, "c'est ce qui arrive aux constructions des enfants sur la plage. Les abords des trous s'affaissent au fur et à mesure que l'on creuse, entraînant tout le sable autour".
"Ce n'est pas un problème" prétendent les partisans du projet, "nous avons nous aussi nos propres relevés", alignant des pages et des pages de courbes et de schémas très savants. Sauf qu'ils oublient de préciser que les carottage (effectués à leur demande) ont été faits à seulement 10 mètres de profondeur, alors que le tunnel devrait se situer à 20 mètres sous le niveau de la lagune....Aujourd'hui enfin, la population commence de s'émouvoir. On discute beaucoup dans les bars à l'heure du spritz car l'enjeu est de taille : Qui paiera pour réaliser cet ouvrage ? qui paiera aussi pour l'augmentation obligée de l'invasion de touristes que le métro amènera ? Qui paiera pour la dévastation de l'environnement ? Pantalon ou Polichinelle certainement. ....
Les partisans prétendent qu'un tel outil, en mettant l'aéroport à moins d'un quart-d'heure de la Piazza, permettrait aux vénitiens d'aller et venir pour leur travail, sans les inconvénients actuels des transports nautiques. Cela limiterait le nombre de bateaux et par là même contribuerait à la diminution du moto ondoso (ces remous qui endommagent les fondations de la cité des doges), les marchandises circuleraient mieux et plus vite, et donc à un meilleur coût, facilitant la vie des habitants du centre historique... Autre argument entendu de la bouche d'un politique fervent du modernisme : "La Sublagunare de Tessera au Lido, puis à Chioggia, en passant par la "pancia del Mose" ? mais Venise entrerait enfin dans le XXIe siècle au même titre que les grandes métropoles urbaines". Sans être passéiste, ni militant écologiste, on voit vite que face au danger pour l'équilibre environnemental de la lagune, déjà bien malmené, et face aux risques pour la structure même de la ville et de ses monuments, aucun argument ne tient longtemps. Surtout pas un argument économique. "La logique des partisans reste toujours la même, elle domine en Italie depuis un certain nombre d'années comme partout en Occident : le profit à tout prix" dit un militant altermondialiste, approuvé bruyamment par toute la clientèle du bar.
Ce n'est certainement pas un métro qui ramènera les habitants chassés par les prix prohibitifs du mètre carré dans le centre historique, la fermeture des écoles, des maternités, la disparition des commerces de proximité, la fermeture des ateliers. Les entreprises qui se sont installées sur la terre ferme ne vont pas revenir parce qu'on aura installé un métro. Quant aux marchandises, depuis quand peuvent-elles être livrées par le métro ? Même en maintenant des lignes de bateau assurant la liaison touristique entre Tessera et la Sérénissime, bien des touristes préféreront le métro qui leur permettra de gagner du temps. Ou bien devra-t-on envisager d'interdire le métro aux étrangers ? ou de leur faire payer encore plus cher que le billet touristique de l'ACTV ? Et puis qui paiera l'addition quand on sait qu'un kilomètre de tunnel métropolitain coûte en temps normal 100 millions d'euros, que l'ensemble du chantier pourrait avoisiner le milliard d'euros pour un prévisionnel de 7000 passagers par jour. C'est en siècles qu'il faut envisager l'amortissement sur une hypothèse de 35000 euros de recette quotidienne !
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgL4c5AiItutk9pzZ3Iq1B5CSxjeow6x_Qw32y1_GD-0KyWcKafaDWfhMzKnnvDWGYzQK7BMKfa5NzZzQtxXbfgbSrpmv-QtSYDIBTRPCb_rImWLOBL7pMl0Qfp9g-APEZXL5-vdoHQN5Dz/s320/Sublagunare+6.jpg)
Veneto City
Hélas, tandis que tout cela se discute au coin des rues et dans le moindre bacaro du centro storico, tandis qu'en commission, les élus municipaux réfléchissent enfin avec les techniciens sur l'utilité et la compatibilité de ce nouvel ouvrage pharaonique, dans le bureau du Président de la Région, l'avenir est déjà tracé : Le nouveau PtrC (Plan territorial de Coordination) prévoit en effet la future liaison métropolitaine sous la lagune. Il n'y a pas encore l'argent, ni suffisamment d'éléments favorables, mais il y a la détermination des élus régionaux. L'idée va avec le désir de ces messieurs de concrétiser Veneto city, deux millions de mètres cube de béton entre Dolo, Mira et Pianiga. "Tout cela fait partie d'une stratégie d'avenir mise en place en pleine concertation avec les municipalités concernées" signale le porte-parole du Conseil Régional.....
Propos aussitôt contestés par le maire de Venise, qui clame haut et fort "Ma per piacere (mais je vous en prie), dites la vérité : sur ces deux points il n'y a eu aucune espèce de concertation". Massimo Cacciari a toujours émis les plus fortes réserves sur l'utilité et le coût du Mose et de la sublagunare. Comme il doute du projet Veneto city, barre de béton de plusieurs kilomètres, qui non seulement, mangerait encore une partie du territoire lagunaire que la région prétend vouloir protéger, mais pourrait compromettre le réaménagement des anciennes zones industrielles Porto Marghera en pleine restructuration. Pourtant ce plan devrait entrer en vigueur avant Noël, selon l'adjoint régional chargé de l'Urbanisme, Renzo Marangon, et voir son application relayée par les différents Plans d'Aménagement du Territoire des communes concernées. "Ce plan, au-delà des énumérations de principe", se scandalise le conseiller régional des verts depuis 2005, l'écrivain Gianfranco Bettin, "est la traduction vénitienne de ce que fait notre droite au niveau national, la pire des droites européennes. Ils mettent en cause le plan européen de lutte contre l'effet de serre que d'autres pays gouvernés aussi par la droite ont initiés, comme la France ou l'Allemagne. Dans la même logique, ils présentent en région ce plan."
"Veneto City", continue l'écrivain, "est un énorme projet de dévastation de toute la partie centrale du Veneto qui non seulement bétonnera une énorme superficie (ndlr : 550.000 m²) mais conduira à la dévastation d'une partie encore protégée de la région, fera exploser le trafic automobile et étouffera définitivement la relance de Marghera, où les infrastructures sont déjà en place. Quant à la sublagunare, on en parle sans avoir fait la moindre étude sérieuse d'impact environnemental et économique."
Le centre droit pousse avec énergie le projet de la sublagunare. Il y a quatre ans, le ministre Lunardi avait promis les financements nécessaires au maire de Venise de l'époque, Paolo Costa. Maintenant que le centre droit gouverne à Rome et détient la région, le chemin est tracé. Reste l'obstacle de la perplexité croissante de Venise et de la Province. "La Région a déjà décidé du trajet de la sublagunare et c'est comme si c'était fait pour eux" dit Gianfranco Vecchiato, adjoint vénitien à l'Urbanisme, "mais nous n'avons donné notre accord sur rien, sinon que l'axe Venise-Padoue doit être eu centre des nouvelles stratégies de transport et de la nouvelle économie. Il y a encore beaucoup de vérifications à mener au sujet de la sublagunare. je ne pense pas en tout état de cause qu'il soit possible de trouver les ressources nécessaires pour un ouvrage de cette taille".
On a parfois l'impression d'être dans un mauvais film d'anticipation ou bien dans un de ces films des années 70 qui dénonçait l'affairisme imbécile de toute une frange du monde politique italien, quand les mains étaient bien sales et que les coffre-forts suisses se remplissaient de milliards de Lire sortis clandestinement de la péninsule par de gros entrepreneurs, des promoteurs immobiliers et leurs amis politiciens. Même mégalomanie, même morgue et même inpunité.
Pourtant d'autres solutions existent
Il y a les catamarans modernes capables de transporter rapidement de nombreux passagers sans pollution. Les anglais savent construire des hovercraft nouvelle génération, silencieu, qui consomment peu et ne polluent pas, vont à 60 km/heure sans faire de remous sur les flots, peuvent transporter 180 passagers et plusieurs tonnes de marchandisespour un prix de revient inférieur à celui des motonave actuelles de l'ACTV. L'opposition à ce projet fou s'organise, à Tramezzinimag, nous relaierons les informations et les pétitions qui nous seront proposées et nos amis vénitiens comptent sur le monde entier pour réagir et empêcher ce qui pourrait bien s'avérer être la fin de la Venise que nous aimons tous.
Parmi les folles propositions de ceux qui ne comprennent pas la diversité de Venise et qui prétendent la faire ressembler à une métropole moderne lambda, l'une des plus dangereuses semble bien être ce projet de métropolitain, qui menacerait définitivement l'équilibre environnemental, augmenterait la masse des touristes pendulaires, et n'améliorerait en rien l'accessibilité pour les résidents ni ne réduirait le coût de la vie dans le centre historique. Tramezzinimag s'inscrit solennellement contre ce chantier pharaonique autant inutile que dangereux et demande à tous ses lecteurs de manifester leur désapprobation par tous les moyens dont ils disposent.
Car les vénitiens ne comprennent pas la position de la municipalité.
"Le maire suit le
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C'est le groupe Italia Nostra qui a tiré la sonnette d'alarme, devant cette nouvelle atteinte à l'intégrité de la Sérénissime. Le chef de groupe des Verts au Conseil Municipal, Beppe Caccia, a écrit au maire pour demander la suspension définitive du projet en même temps qu'une réunion d'urgence de la majorité municipale. A ce jour, le dossier est toujours entre les mains de l'adjoint aux transports, Enrico Mingardi. Il devrait ensuite être envoyé à Rome. Le projet revu ("amélioré" disent ses partisans) par le groupe d'entreprises qui se sont proposées pour porter le project financing, suite aux nombreux doutes manifestés par les élus tant municipaux que provinciaux, doit suivre la voie normale. "La procédure doit suivre son chemin" nous explique l'adjoint, "puisque la municipalité de 2002 avait déclaré le dossier d'utilité publique, annuler tout cela aujourd'hui coûterait à la ville près de 8 millions d'euros"...Un projet vieux de 20 ans.
En 1990, un premier tracé prévoyait une ligne Tessera-San Marco-Lido, aussitôt bloqué par les nombreuses protestations internationales. Étouffé, il renaît en catimini en 2002, avec la municipalité dirigée alors par Paolo Costa, qui le déclara d'utilité publique, sans que l'opposition puisse l'empêcher. C'est l’adjoint aux Travaux Publics de l'époque, le Procureur Marco Corsini qui en avait pris alors l'initiative. Une simple ligne ajoutée au plan triennal des travaux approuvés par la municipalité, et le tour fut joué.
Les premières offres de service suivirent et c'est ainsi que tout a commencé. Le groupement d'entreprises qui s'était aussitôt mis en lice était formé entre autres de l'Actv (la société des transports urbains de Venise qui s'est retirée avec le retour de Massimo Cacciari à la mairie), et de Mantovani (la même entreprise qui réalise entre autres le Mose et le futur hôpital de Mestre), mais aussi Metropolitane Milanesi, et la Sacaim, tous plus ou moins proches de la Fininvest, la compagnie tentaculaire du Président du conseil Berlusconi. Mais, comme le disait en plaisantant un ami vénitien, "la collusion est un mot qui n'existe plus dans notre vocabulaire en Italie !".
Aucun débat démocratique.
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhUGZQJf81ovhb6E-ga1lAdSlh2s5-c2gM03BKKVEYMeSHbScy8tTdCMrj44Ch9zV7O_FDcBz-jQKndXUofKcvedz17gBHkdxfz3KYtjmrhOfeuhro07wee0t0lF4_Isk5SkUrOkG8fnNmF/s320/sublagunare+5.jpg)
Le gouvernement italien l'a inscrit dans son schéma global d'aménagement du territoire (la Legge Obiettivo) et l'équipe Cacciari n'a pas pu le bloquer au nom de la "continuité administrative". Pourtant les doutes sur la faisabilité et les risques pour la Sérénissime n'ont jamais été levés. Les géologues ont confirmé pourtant récemment que le sous-sol de la lagune est bien plus fragile qu'on ne le pensait. Des couches de sable existent au milieu des strates argileuses qui rendent hasardeuses la construction de galeries et d'excavations profondes. "Ce qui risque de se passer" me disait un ami ingénieur, "c'est ce qui arrive aux constructions des enfants sur la plage. Les abords des trous s'affaissent au fur et à mesure que l'on creuse, entraînant tout le sable autour".
"Ce n'est pas un problème" prétendent les partisans du projet, "nous avons nous aussi nos propres relevés", alignant des pages et des pages de courbes et de schémas très savants. Sauf qu'ils oublient de préciser que les carottage (effectués à leur demande) ont été faits à seulement 10 mètres de profondeur, alors que le tunnel devrait se situer à 20 mètres sous le niveau de la lagune....Aujourd'hui enfin, la population commence de s'émouvoir. On discute beaucoup dans les bars à l'heure du spritz car l'enjeu est de taille : Qui paiera pour réaliser cet ouvrage ? qui paiera aussi pour l'augmentation obligée de l'invasion de touristes que le métro amènera ? Qui paiera pour la dévastation de l'environnement ? Pantalon ou Polichinelle certainement. ....
Les partisans prétendent qu'un tel outil, en mettant l'aéroport à moins d'un quart-d'heure de la Piazza, permettrait aux vénitiens d'aller et venir pour leur travail, sans les inconvénients actuels des transports nautiques. Cela limiterait le nombre de bateaux et par là même contribuerait à la diminution du moto ondoso (ces remous qui endommagent les fondations de la cité des doges), les marchandises circuleraient mieux et plus vite, et donc à un meilleur coût, facilitant la vie des habitants du centre historique... Autre argument entendu de la bouche d'un politique fervent du modernisme : "La Sublagunare de Tessera au Lido, puis à Chioggia, en passant par la "pancia del Mose" ? mais Venise entrerait enfin dans le XXIe siècle au même titre que les grandes métropoles urbaines". Sans être passéiste, ni militant écologiste, on voit vite que face au danger pour l'équilibre environnemental de la lagune, déjà bien malmené, et face aux risques pour la structure même de la ville et de ses monuments, aucun argument ne tient longtemps. Surtout pas un argument économique. "La logique des partisans reste toujours la même, elle domine en Italie depuis un certain nombre d'années comme partout en Occident : le profit à tout prix" dit un militant altermondialiste, approuvé bruyamment par toute la clientèle du bar.
Ce n'est certainement pas un métro qui ramènera les habitants chassés par les prix prohibitifs du mètre carré dans le centre historique, la fermeture des écoles, des maternités, la disparition des commerces de proximité, la fermeture des ateliers. Les entreprises qui se sont installées sur la terre ferme ne vont pas revenir parce qu'on aura installé un métro. Quant aux marchandises, depuis quand peuvent-elles être livrées par le métro ? Même en maintenant des lignes de bateau assurant la liaison touristique entre Tessera et la Sérénissime, bien des touristes préféreront le métro qui leur permettra de gagner du temps. Ou bien devra-t-on envisager d'interdire le métro aux étrangers ? ou de leur faire payer encore plus cher que le billet touristique de l'ACTV ? Et puis qui paiera l'addition quand on sait qu'un kilomètre de tunnel métropolitain coûte en temps normal 100 millions d'euros, que l'ensemble du chantier pourrait avoisiner le milliard d'euros pour un prévisionnel de 7000 passagers par jour. C'est en siècles qu'il faut envisager l'amortissement sur une hypothèse de 35000 euros de recette quotidienne !
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgL4c5AiItutk9pzZ3Iq1B5CSxjeow6x_Qw32y1_GD-0KyWcKafaDWfhMzKnnvDWGYzQK7BMKfa5NzZzQtxXbfgbSrpmv-QtSYDIBTRPCb_rImWLOBL7pMl0Qfp9g-APEZXL5-vdoHQN5Dz/s320/Sublagunare+6.jpg)
Veneto City
Hélas, tandis que tout cela se discute au coin des rues et dans le moindre bacaro du centro storico, tandis qu'en commission, les élus municipaux réfléchissent enfin avec les techniciens sur l'utilité et la compatibilité de ce nouvel ouvrage pharaonique, dans le bureau du Président de la Région, l'avenir est déjà tracé : Le nouveau PtrC (Plan territorial de Coordination) prévoit en effet la future liaison métropolitaine sous la lagune. Il n'y a pas encore l'argent, ni suffisamment d'éléments favorables, mais il y a la détermination des élus régionaux. L'idée va avec le désir de ces messieurs de concrétiser Veneto city, deux millions de mètres cube de béton entre Dolo, Mira et Pianiga. "Tout cela fait partie d'une stratégie d'avenir mise en place en pleine concertation avec les municipalités concernées" signale le porte-parole du Conseil Régional.....
Propos aussitôt contestés par le maire de Venise, qui clame haut et fort "Ma per piacere (mais je vous en prie), dites la vérité : sur ces deux points il n'y a eu aucune espèce de concertation". Massimo Cacciari a toujours émis les plus fortes réserves sur l'utilité et le coût du Mose et de la sublagunare. Comme il doute du projet Veneto city, barre de béton de plusieurs kilomètres, qui non seulement, mangerait encore une partie du territoire lagunaire que la région prétend vouloir protéger, mais pourrait compromettre le réaménagement des anciennes zones industrielles Porto Marghera en pleine restructuration. Pourtant ce plan devrait entrer en vigueur avant Noël, selon l'adjoint régional chargé de l'Urbanisme, Renzo Marangon, et voir son application relayée par les différents Plans d'Aménagement du Territoire des communes concernées. "Ce plan, au-delà des énumérations de principe", se scandalise le conseiller régional des verts depuis 2005, l'écrivain Gianfranco Bettin, "est la traduction vénitienne de ce que fait notre droite au niveau national, la pire des droites européennes. Ils mettent en cause le plan européen de lutte contre l'effet de serre que d'autres pays gouvernés aussi par la droite ont initiés, comme la France ou l'Allemagne. Dans la même logique, ils présentent en région ce plan."
"Veneto City", continue l'écrivain, "est un énorme projet de dévastation de toute la partie centrale du Veneto qui non seulement bétonnera une énorme superficie (ndlr : 550.000 m²) mais conduira à la dévastation d'une partie encore protégée de la région, fera exploser le trafic automobile et étouffera définitivement la relance de Marghera, où les infrastructures sont déjà en place. Quant à la sublagunare, on en parle sans avoir fait la moindre étude sérieuse d'impact environnemental et économique."
Le centre droit pousse avec énergie le projet de la sublagunare. Il y a quatre ans, le ministre Lunardi avait promis les financements nécessaires au maire de Venise de l'époque, Paolo Costa. Maintenant que le centre droit gouverne à Rome et détient la région, le chemin est tracé. Reste l'obstacle de la perplexité croissante de Venise et de la Province. "La Région a déjà décidé du trajet de la sublagunare et c'est comme si c'était fait pour eux" dit Gianfranco Vecchiato, adjoint vénitien à l'Urbanisme, "mais nous n'avons donné notre accord sur rien, sinon que l'axe Venise-Padoue doit être eu centre des nouvelles stratégies de transport et de la nouvelle économie. Il y a encore beaucoup de vérifications à mener au sujet de la sublagunare. je ne pense pas en tout état de cause qu'il soit possible de trouver les ressources nécessaires pour un ouvrage de cette taille".
On a parfois l'impression d'être dans un mauvais film d'anticipation ou bien dans un de ces films des années 70 qui dénonçait l'affairisme imbécile de toute une frange du monde politique italien, quand les mains étaient bien sales et que les coffre-forts suisses se remplissaient de milliards de Lire sortis clandestinement de la péninsule par de gros entrepreneurs, des promoteurs immobiliers et leurs amis politiciens. Même mégalomanie, même morgue et même inpunité.
Pourtant d'autres solutions existent
Il y a les catamarans modernes capables de transporter rapidement de nombreux passagers sans pollution. Les anglais savent construire des hovercraft nouvelle génération, silencieu, qui consomment peu et ne polluent pas, vont à 60 km/heure sans faire de remous sur les flots, peuvent transporter 180 passagers et plusieurs tonnes de marchandisespour un prix de revient inférieur à celui des motonave actuelles de l'ACTV. L'opposition à ce projet fou s'organise, à Tramezzinimag, nous relaierons les informations et les pétitions qui nous seront proposées et nos amis vénitiens comptent sur le monde entier pour réagir et empêcher ce qui pourrait bien s'avérer être la fin de la Venise que nous aimons tous.
Parmi les folles propositions de ceux qui ne comprennent pas la diversité de Venise et qui prétendent la faire ressembler à une métropole moderne lambda, l'une des plus dangereuses semble bien être ce projet de métropolitain, qui menacerait définitivement l'équilibre environnemental, augmenterait la masse des touristes pendulaires, et n'améliorerait en rien l'accessibilité pour les résidents ni ne réduirait le coût de la vie dans le centre historique. Tramezzinimag s'inscrit solennellement contre ce chantier pharaonique autant inutile que dangereux et demande à tous ses lecteurs de manifester leur désapprobation par tous les moyens dont ils disposent.